11.04.2010

Avoir 20 ans en 2010. Juste passionnant.

Courrier International Hebdo n°1044 du 4 novembre 2010.

Edito de Philippe Thureau Dangin.

Génération Courrier international


On connaît le refrain habituel des écolos et des pessimistes de tout poil concernant l’avenir :“Quel monde allons-nous laisser à nos enfants ?” Il est pourtant possible de retourner la phrase, comme nous y invitait l’écrivain radical Jaime Semprun, récemment disparu, et de poser cette autre question, tout aussi inquiétante : “A quels enfants allons-nous laisser le monde ?” Pour le découvrir, nous avons voulu – à l’occasion du 20e anniversaire de Courrier international – dresser le portrait de ces 18-25 ans qui prendront bientôt le monde en main. Et, surprise, le constat n’est pas si noir. Certes, on retrouve ici et là les galères de boulot ou de financement des études, les désarrois sexuels, les errances, la drogue, etc. Mais, en Iran comme au Myanmar, en Haïti comme en Ukraine, des jeunes bougent, réfléchissent, agissent, militent parfois, bref ne se contentent pas de survivre ou de consommer. Le Net, omniprésent dans leur vie quotidienne, les aide à se rencontrer, à échanger. Dans les pays dits développés, nous assistons à une autre histoire. Les années 1950 et 1960 avaient installé l’adolescence comme une classe d’âge, avec ses rites, ses codes, sa culture (et ses modes de consommation). Ces dernières années, les publicitaires avaient parlé d’“adulescents” (kidults en anglais) pour désigner ces jeunes de 18-25 ans qui font tout en groupe, achètent beaucoup et vivent souvent encore chez leurs parents. A en croire The New York Times Magazine, nous assistons aujourd’hui à l’émergence d’une nouvelle classe d’âge, qui irait de 20 ans jusqu’à 30 ans. Des années au cours desquelles ils enchaînent les boulots, petits ou grands, les partenaires et les centres d’intérêt. Comme si l’âge adulte était encore une fois repoussé. Version négative : on peut voir dans ce nouveau statut une preuve de l’infantilisation générale des sociétés. Version positive : si ces jeunes renâclent à entrer dans l’âge adulte, c’est pour mieux garder ouvert l’horizon des possibles. Et ainsi construire un peu mieux que leurs parents l’avenir – le leur et celui du monde où ils vivent. Courrier international, qui a paru pour la première fois le 8 novembre 1990, et qui entre donc dans sa vingt et unième année, veut souscrire à cette idée d’un avenir non clos, fait d’interrogations et de remises en cause, afin de déjouer tous les pronostics pessimistes. 

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